Le cirque n’est pas une fin en soi, mais un puissant moteur pour explorer le potentiel humain et stimuler l’innovation sociale. C’est avec cette conviction au cœur que nous annonçons aujourd’hui la transformation de notre Centre de recherche, d’innovation et de transfert en arts du cirque (CRITAC) en Centre de recherche sur le potentiel humain : HUPR.
Mais revenons tout d’abord en arrière. Comment en sommes-nous arrivés là ?
En sautant dans l’inconnu, Marc Lalonde, ancien directeur général de l’École nationale de cirque de Montréal, a créé la toute première chaire de recherche industrielle sur les arts du cirque au Canada en 2012 avec, déjà, la certitude que le mouvement, la performance et les arts vivants étaient des clés pour la recherche appliquée. J’ai eu l’honneur d’être nommé titulaire de cette chaire, une aventure qui m’a permis de collaborer avec un collectif de chercheur·euse·s interdisciplinaires, créatif·ves et rigoureux·euses. En 2013, je suis également devenu le premier directeur du CRITAC, consolidant ainsi le lien entre la recherche appliquée et les arts vivants.
En 2013, nous avons eu une révélation. Notre équipe a été invitée à la Conférence internationale sur la littératie physique à Banff pour parler des éléments humains clés des arts du cirque — le risque contrôlé, la confiance, l’ouverture, l’exploration et ce que nous appelons le risky play — pour aborder un problème sociétal majeur : la sédentarité des jeunes. Ce sujet n’avait jamais été exploré à travers le prisme des arts vivants. Et notre équipe n’avait jamais pensé mesurer l’impact potentiel du cirque dans les écoles jusqu’à ce moment précis. Depuis, les rencontres improbables et partenariats collaboratifs n’ont cessé de se multiplier.
En 2016, Éric Langlois est venu remplacer Lalonde en tant que DG de l’École nationale de cirque et soutenir la direction innovante que prenait notre recherche. C’est à ce moment que l’idée de créer une nouvelle identité pour notre centre de recherche a commencé à se solidifier.
Dans cette optique, en 2022, nous avons découvert un partenaire idéal dans le studio de création GRDN, pour nous aider à partager nos réalisations et jongler avec nos nouveaux potentiels, en ayant une confiance ferme dans le processus. Parce que, pour nous, la seule façon d’atterrir ailleurs était de décoller avec des gens qui partagent les mêmes valeurs et qui sauraient nous donner le bon élan. Avec eux nous avons trouvé notre nouvelle identité et notre nouveau nom, HUPR, pour évoquer la hardiesse de notre équipe et du potentiel humain.
Prenons par exemple le projet N.Ormes, deux acrobates, Agathe et Adrien, interrogent les rapports de genre à travers le main à main dans des contextes de médiation sociale par l’art, mais également dans le milieu de la recherche académique. Dans Urgences Rurales 360 de Julie Théberge, en collaboration avec la compagnie Les 7 Doigts et la Chaire de recherche et d’innovation en médecine d’urgence, met en lumière les problèmes hospitaliers en milieu rural et l’impact potentiel de la performance sur les perceptions citoyennes au moyen d’une conférence-spectacle.Le projet de recherche-création écH2osystème : du fleuve à la scène, initié par la chercheuse Geneviève Dupéré, explore quant à lui la dynamique complexe de l’écosystème du Saint-Laurent dont l’humain fait partie, au moyen d’une approche rassemblant plus de 300 collaborateur·rice·s des secteurs des sciences, des pêcheries, de l’industrie et des arts du cirque.
Le point d’arrivée de nos recherches n’est jamais prédéterminé. Et lorsque nous concevons des projets, nous souhaitons qu’ils changent notre perception des possibles. Parce que l’art, en particulier l’art de la performance incarnée, peut être un médiateur qui conduit au changement social. À travers chacune de ces implications de ces projets sur le potentiel humain, nous étendons les ancrages des arts du cirque — rencontre, curiosité, risque, ouverture, surprise — dans d’autres disciplines.
À nos activités en recherche appliquée s’ajoutent également des services de formation, d’accompagnement et d’aide technique dans des entreprises issues des industries créatives et artistiques ainsi qu’auprès de petits, moyens et grands organismes scolaires, communautaires ou institutionnels. Toujours avec cette intention de contribuer concrètement à élever le potentiel humain, nous nous retrouvons tantôt à développer une nouvelle technologie innovante de capture de mouvement pour la performance humaine ou encore des équipements ergonomiques dans des écoles pour favoriser les apprentissages des enfants.
Pour moi, la raison d’être de notre recherche est de collaborer, d’expérimenter et de mettre en mouvement du changement positif. En d’autres mots, l’objectif de HUPR n’est pas seulement de faire grandir les arts vivants dans notre société, mais de faire grandir la société à travers les arts vivants. Si le monde des arts de la scène doit nous rappeler quelque chose, c’est que les capacités humaines sont infinies le potentiel humain est infini, et que, pour créer de l’innovation qui change le monde, il est essentiel de s’appuyer sur des communautés transdisciplinaires fondées sur la confiance et la prise de risques.
Longue vie à HUPR!
—
Patrice Aubertin